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Moi, Daniel Blake (2016) de Ken Loach avec Dave Johns, Hayley Squires, Natalie Ann Jamieson...

      Très franchement, si vous vous attendez à lire une critique qui tente (vainement) d’être objective, passez votre chemin. J’ai toujours apprécié le travail de Ken Loach, notamment pour l'engagement et l'intégrité qui transpirent dans ses œuvres. Toute sa vie (et son œuvre) fut un combat politico-social et ce dernier film en est le point d’orgue (du moins avant qu’il renonce à sa retraite, comme souvent). Alors, que ce film soit primé à Cannes, je m’en tamponne royalement, il n’est pas question de revenir là-dessus. Je peux même imaginer que le principal intéressé ne se soucie guère du monde huppé cannois, il a dû juste apprécier que le message de son film puisse toucher plus de monde à travers cette palme d’or.
      De révolte, il n’est question que de ça durant les 100 minutes du film. Ce noble sentiment, est mis en avant par le principal protagoniste : Daniel Blake (Dave Johns), figure de l’homme coincé dans les rouages de l’administration. C’est à 58 ans et suite à un arrêt cardiaque que Daniel Blake, va pour la première fois de sa vie faire appel à des aides sociales. Étant déclaré inapte au travail par ses médecins, il peut légitimement percevoir une allocation prévue par le système social anglais pour ce type de cas. Or, vu que les aides sociales (et les pauvres qu’elles symbolisent) sont les maux de notre société, tout est fait pour qu’elles soient difficiles voire impossibles à percevoir. Les bienfaits de l’austérité.
    Commence alors pour Daniel, une partie de ping-pong kafkaïenne entre les différents services téléphoniques, les différents bureaux où les employés « ne font que suivre le protocole », etc... Bref, une longue descente aux enfers, visant à écraser le poids de l’individu « faible » pour le foutre gentiment, avec ses camarades, au ban de la société. Nous sommes en 2016, n’oubliez pas. A côté de cette intrigue, Daniel fait la rencontre d’une autre victime de nos sociétés libérales, Katie Morgan (Hayley Squires), jeune mère de deux enfants plongée dans une précarité insupportable. Daniel n’aura de cesse d’aider cette famille pour s’apaiser lui-même de ses deuils (il est veuf et sans enfant) mais aussi pour mener sa révolte pacifiquement, en aidant les nécessiteux.
       Décrit comme je viens de le faire, on pourrait penser que le film surfe sur des clichés déjà bien connus et pourrait même être démagogue. Sur ce dernier point, seule votre propre opinion pourra en juger, reste néanmoins que le propos du film est honnête. S’il choisit (comme souvent) la fiction pour relayer son message, Loach aurait pu en faire un documentaire tant ces situations sont réelles et concrètes. C'est certainement la fiction qui lui permet d’aller au bout de son processus et de livrer une œuvre sombre et révoltée. Rarement, Loach aura autant fait transparaître sa colère contre les fossoyeurs de nos aides sociales, ce qui explique sûrement pourquoi il y a peu d’humour et peu d’espoir tout le long du film. Ce qui dénote notamment avec "Looking for Eric" (2009) et "La part des anges" (2012), deux œuvres récentes plus « légères ».  Il est pourtant question d'humanisme et de solidarité entre Daniel et les personnes qu’il est amené à côtoyer, mais consciencieusement Loach broie ces liens à travers la rudesse de nos sociétés. Bonjour tristesse !
       La révolte est donc au coeur de ce long métrage. Celle de Daniel Blake (donc de Ken Loach) vous reviendra dans la tronche, vous aussi vous serez révoltés le temps du film par tant d’injustices, d’humiliations, vous aussi vous serez touchés par la tristesse de notre société qui, se vantant d’avoir « progressé », plonge en réalité dans un triste retour archaïque.
"Hasta la révolucion", maybe…
 
Note : 17/20
Nifa
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